Le CWATUP fait place au CoDT : une planification plus souple

Philippe Pieters
Architecte & Urbaniste
DR(EA)²M
Auteur de projets agréé RW

 

Le parlement wallon avait voté le décret relatif au Code du Développement Territorial en juillet 2016. Il ne manquait plus que les arrêtés d’application pour rendre ce nouveau cadre législatif pleinement effectif. C’est désormais chose faite : grâce à l’arrêté du Gouvernement du 22 décembre 2016, l’ensemble des nouvelles dispositions entrera en vigueur le 1er juin 2017 et constituera le plus important changement de cap depuis vingt ans dans le droit wallon de l’aménagement du territoire. Que convient-il d’en retenir en matière de planologie ?

Vers une généralisation du caractère indicatif des instruments

La volonté du législateur est de passer de « l’urbanisme de contraintes », symbolisé par les plans d’aménagement et les règlements d’urbanisme, à « l’urbanisme de projets » grâce à une conception plus souple des instruments d’aménagement du territoire. Pour ce faire, la Wallonie a notamment opté pour une quasi-généralisation du caractère indicatif des documents d’encadrement. Concrètement, seul le plan de secteur et une infime partie des règlements régionaux d’urbanisme conserveront une valeur normative, tous les autres documents auront valeur de guide. On distinguera ainsi désormais, dans l’ordre hiérarchique, le schéma de développement du territoire (SDT, à l’échelle de la Wallonie, équivalent de l’actuel SDER), le guide régional d’urbanisme (GRU, équivalent des règlements régionaux actuels), le schéma de développement pluricommunal (SDP, outil entièrement nouveau permettant à plusieurs communes de réfléchir ensemble à leur développement territorial), le schéma de développement communal (SDC, à l’échelle d’une commune entière, équivalent de l’actuel SSC), le guide communal d’urbanisme (GCU, équivalent de l’actuel RCU) et le schéma d’orientation local (SOL, à l’échelle d’une partie de commune, équivalent des PCA et RUE actuels). Comme aujourd’hui, les communes resteront libres de se doter ou pas de ces outils.

Les conséquences attendues de cette nouveauté sont notamment les suivantes.

Une hiérarchie plus claire (plus d’ambiguïté telle que celle du plan communal d’aménagement révisionnel qui emportait un effet de modification du plan de niveau supérieur sans que ce soit perceptible au sein de ce dernier) ;

Des « balises » plus générales : les documents d’aménagement se concentreront sur les affectations, les densités, le maillage de voiries de la partie de territoire concernée, éventuellement sur les modes d’implantation et la hauteur des constructions si l’on souhaite apporter ces précisions (exit donc les listes de matériaux autorisés, les pentes de toiture, les proportions des baies, les types de clôtures…) ;

Des procédures harmonisées et, a priori, plus rapides (on comptait quatre procédures différentes pour les seuls outils d’initiative communale ;

Des écarts (et non plus des dérogations – lesquelles entraînaient beaucoup de lourdeurs administratives) plus aisément négociables avec les autorités compétentes dans le cadre de projets concrets pour autant qu’ils respectent la philosophie générale de l’outil de référence.

Des nouveautés intéressantes

Il nous semble opportun d’épingler deux dispositions neuves qui résolvent des faiblesses du CWATUP : l’initiative privée en planologie locale d’une part, et les procédures conjointes (plan-permis ou périmètre-permis) d’autre part.

Jusqu’ici, dans certains cas nécessitant obligatoirement l’élaboration et l’adoption d’un instrument communal d’aménagement (PCA ou RUE), il était impossible, pour un propriétaire de terrains, d’envisager la mise en œuvre de ceux-ci de manière directe. Le cas de figure le plus fréquent était celui des personnes (ou des sociétés) disposant de surfaces importantes en zone d’aménagement communal concerté (anciennes zones d’extension d’habitat), qui ne pouvaient espérer la valorisation de leur patrimoine qu’au travers d’une initiative communale (les pouvoirs locaux ayant de nombreuses autres matières à gérer, lesdites initiatives tardaient généralement à venir, se reportant éventuellement de législature en législature). À partir du 1er juin 2017, toute personne (physique ou morale, privée ou publique) qui possède un droit réel sur au moins deux hectares de terrain d’un seul tenant pourra soumettre à la commune concernée un avant-projet de schéma d’orientation. Si le Conseil communal approuve la proposition, la procédure pourra se poursuivre comme s’il s’agissait d’une initiative publique.

Le nouveau décret institue par ailleurs des procédures conjointes destinées à éviter aux porteurs de projets de devoir passer par une succession d’autorisations administratives. Il n’était pas rare, en effet, que des projets particuliers (à vocation économique, commerciale, immobilière ou de loisirs) prennent plusieurs années et nécessitent l’enchaînement de deux à trois procédures, chacune soumise à une évaluation des impacts environnementaux. Le CoDT rend ainsi possible l’instruction conjointe de la démarche de planification et de la demande de permis (d’urbanisme, unique ou intégré), avec une seule évaluation des incidences environnementales, une seule enquête publique et une seule consultation des instances. Cette nouvelle faculté peut s’appliquer également en matière de réaffectation de sites (SAR) et de remembrement urbain (PRU).

Conclusions

Le nouveau Code contient encore bien d’autres dispositions qu’il conviendra d’expliciter, notamment en matière de révision des plans de secteur (notions de « zones d’enjeu régional » et « d’enjeu communal »).

Quoi qu’il en soit, nombreux sont les acteurs de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme, de l’architecture et de l’immobilier qui attendent avec impatience l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions et la simplification administrative qu’elles devraient permettre.

Pour plus de renseignements sur le sujet, retrouvez Philippe Pieters lors de notre formation Le CoDT bis les 25 et 26 avril 2017, à Namur.

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