Les bâtons de la FSMA, la compliance et les assurances

JM Gollier

Jean-Marc Gollier
Avocat
Eubelius

Président de séance de la conférence IFE  sur compliance en assurance du 15 octobre 2015 à Bruxelles.

La FSMA a frappé un grand coup en mai 2015 en transposant en Belgique une méthode utilisée au Royaume Uni et aux Pays-Bas pour réprimer une pratique jugée contraire aux règles de MiFID. Il s’agissait de la vente par des établissements de crédits de « bermudan swaps » depuis le 1er novembre 2007 à des PME qui n’avaient pas la qualité de professionnels au sens de MiFID. En substance, ces instruments de couverture du risque de hausse des taux d’intérêts comprenaient une option qui permettait au banquier de mettre fin à l’opération unilatéralement, tandis qu’une telle option n’était pas ouverte au client.

Avec l’action totalement non conventionnelle des banques centrales pour contrer la crise financière en injectant massivement des liquidités, les taux d’intérêts se sont retrouvés à un niveau bas encore jamais atteint. Avec la persistance de ces taux artificiellement bas, les swaps de couverture contre leur hausse ont abouti, pendant toutes ces années, à des paiements importants par les PME qui avaient souscrits des swaps contre la hausse de ce taux.

Outre la nature déséquilibrée de l’option ouverte uniquement à l’établissement de crédit, la FSMA reprochait aux établissements de crédits de ne pas avoir fait les « diligences » nécessaires pour identifier les moyens et les besoins de leurs clients et de ne pas avoir adéquatement informé leurs clients.

Si le constat s’arrêtait là, cette action de la FSMA aurait simplement été saluée comme une bonne action de police dans le cadre de ses missions de protection des consommateurs de produits financiers, un avertissement au secteur.

Mais la FSMA n’en est pas restée là. Elle a publié son « jugement » in abstracto et a imposé in concreto le remède qu’il convenait d’apporter à cette faute. Toutes les situations défaillantes répondant au schéma identifié par la FSMA devaient faire l’objet d’une « action de remédiation » avec un arrangement individuel (indemnisation qualifiée de « geste commercial ») dans un délai de 4 mois. Autant dire qu’il y a eu une certaine agitation depuis lors et que, bien que le délai de 4 mois arrive à présent à échéance, nombre de situations n’ont pas encore été « remédiées ». Alors que la jurisprudence judiciaire était plutôt favorable aux établissements de crédits, la prise de position de la FSMA semble faire pencher la balance du côté du consommateur, en donnant aux plaideurs de nouveaux arguments et l’autorité de l’organe de contrôle.

Le monde de l’assurance est lui aussi exposé à ce genre d’action brutale mais peut-être salutaire de la FSMA, qui ne craint pas de provoquer une menace sur la rentabilité des entreprises concernées. La FSMA n’est plus le contrôleur prudentiel, soucieux d’abord de la rentabilité de ses administrés, mais le protecteur des consommateurs et de l’intégrité des marchés.

Voilà une nouvelle démonstration du rôle crucial du compliance officer qui doit agir comme un rigoureux surveillant de l’« équité » et de la « transparence » des affaires, deux mots si souvent utilisés à tort et à travers dans cette époque trouble de taux d’intérêts artificiellement bas.

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