Focus sur la responsabilité des constructeurs

Kohl_2007_pasfoto(photoID).jpgBenoît Kohl
Professeur à l’Université de Liège
Professeur invité à l’Université de Paris II (Panthéon-Assas)
Avocat au Barreau de Bruxelles

Le salon Batibouw ouvrira bientôt ses portes à Bruxelles. Les chiffres de fréquentation le démontrent comme chaque année : « Le Belge a une brique dans le ventre », ou plutôt : « Le Belge qui n’a jamais construit a une brique dans le ventre. » En effet, de nos jours, les aléas techniques ne sont plus les seules entraves que rencontre le futur bâtisseur. Les contraintes juridiques contribuent, tout autant que les premières, à parsemer d’obstacles le parcours du maître de l’ouvrage, tout comme celui de l’entrepreneur.

Les opérations de construction immobilière constituent, pour les juristes, un merveilleux terrain de jeu – les maîtres de l’ouvrage ou entrepreneurs y verront sans doute un horrible terrain miné -, car elles sont, sans doute, celles à l’occasion desquelles les questions de responsabilité contractuelle et extracontractuelle sont le plus imbriquées.

 I.  Responsabilité contractuelle et extracontractuelle

Pour ne prendre qu’un exemple, la question de l’action du maître de l’ouvrage contre le sous-traitant de l’entrepreneur demeure très controversée. Y répondre suppose une connaissance approfondie de la jurisprudence la plus récente des cours et tribunaux, mais également de la Cour constitutionnelle. La qualification contractuelle retenue par les parties au contrat de sous-traitance ou par le juge présente également une importance fondamentale. En effet, la Cour de cassation, par des arrêts récents, réserve un sort différent à l’action initiée par le maître de l’ouvrage contre le cocontractant de l’entrepreneur, selon que la relation contractuelle nouée entre ceux-ci s’apparente à un contrat de fourniture de biens, plutôt qu’à un contrat de prestation de sous-traitance. La présence de clauses d’exonération dans le contrat de sous-traitance, dans le contrat d’entreprise générale, voire dans les contrats postérieurs de vente de l’immeuble, doit également être analysée.

II.  Les délais

Une fois le principe de l’action en responsabilité établi, la connaissance des délais dans lesquels celle-ci doit être introduite est, bien entendu, essentielle. Ces délais sont différents selon que l’action se fonde sur la responsabilité décennale des entrepreneurs, sur la responsabilité contractuelle de droit commun (en présence de vices cachés « véniels »), sur la garantie des vices cachés du vendeur, ou encore sur la responsabilité quasi délictuelle. Or, sur ce point également, la jurisprudence évolue, au fur et à mesure de l’apparition de nouvelles questions, comme celle de l’extension du délai décennal en présence d’un accord des parties sur ce point.

III.  Quelle influence du droit européen ?

Enfin, l’évolution du droit européen dans le secteur de la construction mérite également l’attention. Si l’on pense, bien entendu, aux difficultés liées à la transposition de la directive services, les projets de la Commission européenne en vue de l’harmonisation du droit des contrats (notamment la proposition de règlement optionnel relatif au droit européen de la vente), ainsi que ceux du Parlement européen en matière de garanties dans le secteur de la construction (en particulier le « rapport Elios 1 » et le futur « rapport Elios 2 »), sont autant de thématiques qui façonneront les relations juridiques futures des acteurs du secteur de la construction.

Bref, la maîtrise des principes du droit de la responsabilité des constructeurs suppose un renouvellement permanent des connaissances, tant sont importantes les évolutions de la jurisprudence belge en cette matière, et tant les modifications attendues de l’évolution du droit européen dans ce domaine pourraient révolutionner la manière de percevoir certains principes juridiques bien établis dans ce secteur.

Pour en savoir plus, retrouvez Benoît Kohl lors de la matinée Responsabilité des constructeurs du 26 février 2013 à Bruxelles :

Laisser un commentaire