Le statut du médecin hospitalier – Interview

Philippe Levert
Avo
cat au barreau de Bruxelles
Chargé de cours à l’ULB
DLM – Association d’avocats

1- Quelles sont les récentes évolutions du statut du médecin hospitalier ?

La matière n’a pas connu d’évolution récente. La dernière intervention législative est, en effet, la coordination des dispositions relatives aux hôpitaux et à d’autres établissements de soins, par la loi 10 juillet 2008.

Ceci ne signifie pas, pour autant, que la matière ne connaît pas indirectement des évolutions. En témoignent des décisions récentes rendues par le Tribunal des référés de Mons et la Cour d’appel de Liège qui ont reconnu le droit d’agir en justice de conseils médicaux. Alors même que ces conseils médicaux ne disposent pas de la personnalité juridique, ces juridictions ont estimé que ces conseils étaient recevables à agir pour obtenir le respect de la procédure dite de l’avis renforcé du conseil médical dans le cadre de procédures de rapprochement d’hôpitaux. Il s’agit là d’une première qui peut augurer de futures actions dans le cas où cette procédure ne serait pas respectée, notamment en cas de divergence d’interprétation quant à la nature de l’avis à émettre par le conseil médical : avis ou avis renforcé.

2- En quoi le statut du médecin hospitalier est-il spécifique ?

Le statut du médecin hospitalier est spécifique en ce sens qu’il fait coexister plusieurs catégories de médecins hospitaliers selon la nature de la relation de travail : indépendant, statut, contrat de travail et ce à raison du caractère public ou privé de l’institution hospitalière. Cette spécificité se retrouve également en termes de perception des honoraires (il s’agit d’une perception centrale par l’hôpital) et de rémunération du médecin (pool d’honoraires, à l’acte ou salaire), ce qui implique, selon le type de rémunération, des problématiques différentes. On songe ici à la question des conventions de pools d’honoraires et aux difficultés que de telles conventions peuvent susciter.

À cela s’ajoute la coexistence de la réglementation générale de l’hôpital avec les conventions individuelles entre les médecins et l’hôpital quant au régime juridique liant ces parties.

3- Assistez-vous aujourd’hui à une recrudescence du contentieux en matière de responsabilité des médecins hospitaliers ?

Assurément. L’influence des séries américaines et des pratiques d’outre-Atlantique en termes de réparation matérielle des erreurs médicales se font clairement sentir.

Par ailleurs, il faut tenir compte d’un nouvel élément, soit l’entrée en vigueur au 1er septembre 2012 de la loi du 31 mars 2010 relative à l’indemnisation des dommages résultant de soins de santé. Cette loi crée un « Fonds des accidents médicaux » qui pourra indemniser la victime d’un acte médical dommageable ou ses ayants droit, dans quatre cas.

Lorsque le dommage subi est grave et trouve sa cause dans un accident médical sans responsabilité.

Lorsque le Fonds est d’avis ou qu’il est établi que le dommage trouve sa cause dans un fait engageant la responsabilité d’un prestataire de soins, dont la responsabilité civile n’est pas, ou pas suffisamment, couverte par un contrat d’assurance.

Lorsque le Fonds est d’avis que le dommage est grave et trouve sa cause dans un fait engageant la responsabilité d’un prestataire de soins et que celui-ci, ou son assureur, conteste la responsabilité.

Lorsque l’assureur couvrant la responsabilité du prestataire de soins qui a causé le dommage formule une offre d’indemnisation que le Fonds juge manifestement insuffisante.

La loi du 31 mars 2010 définit la notion de dommage grave pour l’application de ces hypothèses, soit que le patient est décédé, subit une invalidité permanente d’au moins 25 % ou une incapacité temporaire de travail d’au moins six mois ou encore supporte des troubles particulièrement graves, y compris d’ordre économique, dans ses conditions d’existence.

Le Fonds devrait disposer d’un budget annuel de 22 000 000 €.

Pour en savoir plus, retrouvez Philippe Levert lors de la matinée « Le statut du médecin hospitalier » du 4 décembre 2012 à Bruxelles.

Laisser un commentaire