Le nouveau cahier général des charges… presqu’une réalité ! – Article

François Bauduin
Directeur des marchés publics
SPW

Le nouveau cahier général des charges… presqu’une réalité !

Intégrées dans le cadre de la réforme de la réglementation des marchés publics, les règles d’exécution des marchés publics et des concessions de travaux publics ont également fait l’objet d’une refonte en profondeur de la part du législateur.

Non limitée à un simple toilettage terminologique certes indispensable, la révision de l’actuel arrêté royal du 26 septembre 1996 établissant les règles générales d’exécution des marchés publics et des concessions de travaux publics et de son annexe, le cahier général des charges des marchés publics de travaux, de fournitures et de services et des concessions de travaux publics, assure de manière principale l’exécution de l’article 39 de la loi du 15 juin 2006[1] et transpose en partie les directives européennes relatives à la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales[2].

Champ d’application

Pouvoirs adjudicateurs visés

Le nouvel arrêté royal s’appliquera aux pouvoirs adjudicateurs visés au titre II (marchés de niveau fédéral, régional, local et certains marchés subventionnés), au titre III (marchés passés dans les secteurs spéciaux), ainsi qu’aux marchés publics dans les domaines de la défense et de la sécurité de la loi du 15 juin 2006[3].

Seuils d’application

Les montants et modalités fixés à l’article 3 de l’actuel arrêté royal du 26 septembre 1996 ont été revus à la hausse, le seuil du montant estimé égal ou supérieur à 22 000 € hors TVA rendant le cahier général des charges applicable passant à un montant estimé supérieur à 30 000 €.

Concernant les marchés passés par simple facture acceptée, le seuil de 5 500 € hors TVA actuel a été revalorisé à 8 500 € hors TVA pour les secteurs classiques et à 17 000 € pour les secteurs spéciaux.

Par ailleurs, le projet énumère diverses hypothèses qui, quel que soit le montant estimé du marché, engendrent la non-application des règles générales d’exécution contenues dans l’arrêté royal nouveau. Citons en exemples, les marchés de services juridiques et les services sociaux.

Révolution ou simple évolution ?

Cela posé, faut-il parler d’une réelle révolution ou d’une évolution des règles d’exécution des marchés publics ?

Révolution certainement si l’on envisage l’approche structurelle qui rompt radicalement avec le texte actuel. Quant à la révision des dispositions de fond, elle poursuit avant tout, ainsi que le précise le Rapport au Roi, un objectif de cohérence et prend en compte, en termes de nouveautés, les enseignements de la pratique des quinze dernières années.

Sans exclusive, on notera néanmoins un changement de perspective important concernant les règles en matière de paiement (outre une disposition commune, chaque catégorie de marché, y compris les marchés de promotion et concessions de travaux, sont visés par une disposition particulière et une distinction est opérée suivant que le marché est conclu avant ou après la date butoir du 16 mars 2013) et de responsabilité (actuel article 16 du cahier général des charges).

Sans naturellement prétendre à l’exhaustivité, nous nous bornerons ici d’une part, à préciser les modifications formelles fondamentales et d’autre part, à porter un point d’attention ciblé sur quelques  règles de fond innovantes.

Sur le plan formel

Les règles d’exécution sont désormais contenues dans un document unique structuré en sept chapitres dont les deux premiers concernent :

– les dispositions générales et notamment, à l’instar de la loi du 15 juin 2006 et de l’arrêté royal du 11 juillet 2011, un article dédié aux définitions des concepts utilisés dans l’arrêté royal (chapitre 1) ;

– les dispositions communes à tous les marchés, qui comprennent entre autres, des articles concernant les moyens électroniques, la sous-traitance, les droits intellectuels ou encore les moyens d’action du pouvoir adjudicateur (chapitre 2).

Les  chapitres suivants reprennent les règles propres aux marchés de travaux y compris les marchés de promotion (chapitre 3), les concessions de travaux publics (chapitre 4), les dispositions propres aux marchés de fournitures (chapitre 5), les dispositions propres aux marchés de services (chapitre 6) et enfin, les dispositions finales qui concernent l’entrée en vigueur du texte (chapitre 7).

Sont également reprises dans l’arrêté royal des dispositions déjà présentes dans la loi du 15 juin 2006 et/ou dans l’arrêté royal du 11 juillet 2011.

Citons les articles concernant les avances, les moyens électroniques, le respect des obligations sociales par les adjudicataires ou encore la révision des prix via les formules de révision, qui subit une mutation en profondeur.

Règles de fond

Les modifications présentes dans le projet d’arrêté sont de diverses natures qui vont de la reformulation, la restructuration, à la simplification administrative jusqu’à la nouveauté pure et simple.

En termes de dispositions nouvelles et à titre purement exemplatif, relevons :

– en matière de dérogations, le recours à la notion d’abus manifeste en la matière et celle relative aux paiements et la possibilité circonstancielle de prévoir un allongement des délais de paiement ;

– en matière de sous-traitance, l’introduction d’un article visant l’hypothèse de la sous-traitance imposée ;

– la refonte de l’article 14 actuel, relatif aux droits intellectuels qui font l’objet d’une section spécifique comprenant pas moins de quatre articles distincts ;

– en matière de sanction, l’introduction d’une procédure de remise partielle des pénalités, cette procédure n’étant prévue actuellement que pour la remise des amendes de retard ;

– en cas de révision du marché en raison de circonstances imprévisibles, l’introduction de critères fixant le seuil du préjudice très important et l’application d’une franchise à appliquer au montant de l’indemnité ;

– en application de la directive 2011/7/UE précitée, une indemnisation forfaitaire de 40 € et la possibilité d’une indemnisation complémentaire offerte à l’adjudicataire en cas de retard de paiement (exemples : frais d’avocat ou de société de recouvrement de créances).

Citons encore la possibilité de recourir aux avances pour les marchés de fournitures et de services conclus selon les usages sur la base d’un abonnement.

Signalons enfin, l’adaptation du nouveau texte à la modalité particulière de passation du marché qu’est l’accord-cadre, par hypothèse absent du texte de l’arrêté royal du 26 septembre 1996 et de son annexe, le cahier général des charges[4].


[1] Article 39. Le Roi fixe les règles générales d’exécution des marchés publics.

[2] Directive 2000/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 juin 2000 et la Directive 2011/7/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011.

[3] Titre 2 de la loi du 13 août 2011.

[4] Article 7 alinéa 2 : pour ce qui concerne les marchés conclus sur la base de l’accord-cadre, l’ensemble des dispositions, sans préjudice des articles 5 et 6, sont d’application, sauf disposition contraire dans les documents du marché.

 

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